Dans son édition du 19 juillet 2008, l'AAFC-Bourgogne vous présentait un couples d'oenologues asiatiques - lui, Koji Nakada est japonais, elle, Park Jae-hwa, est coréenne - qui ont créé leur propre société, Lou Dumont, pour commercialiser en Extrême-Orient les vins d'Asie, et plus particulièrement les vins de Bourgogne, dont ils sont également producteurs. Le comité régional de l'AAFC en Bourgogne reproduit ci-après le portrait que leur a consacré Le Bien Public, quotidien régional de la Côte d'Or, dans son édition de Dijon du mercredi 23 septembre 2009, sous le titre "Manga bourguignon".
"La vie vous réserve parfois de drôles d'allers-retours : il y a vingt ans, un jeune Japonais découvrait la culture française, et notamment le vin, en travaillant dans un restaurant français de Tokyo nommé Pépé le Moko. Vingt ans plus tard, ce même citoyen nippon et son épouse sud-coréenne produisent, en Bourgogne, un vin qui apparaît dans un manga, l'une des expressions de la culture extrême-orientale la plus populaire en France aujourd'hui.
Le tome IX des Gouttes de Dieu, tout juste édité en France, met en vedette un Meursault 2003 arborant l'étiquette orangée siglée Lou Dumont, du nom de la société que Jae-hwa et Koji Nakada ont créée à Gevrey-Chambertin, il y a neuf ans. Les Gouttes de Dieu est un manga en quinze tomes que l'on doit à deux Japonais passionnés de vin : Tadashi Agi et Shu Okimoto, publié en France chez Glénat.
Dans cette série à la documentation impressionnante, de nombreux viticulteurs bourguignons sont mis en lumière. Mais qu'un bourgogne dû au travail d'un négociant-éleveur japonais s'y trouve également ne manque pas de sel.
Le fait résonne en tout cas de belle manière pour les créateurs de Lou Dumont qui voient là une reconnaissance de leur travail inespérée. "Dès que le manga est paru au Japon et en Corée du Sud, la demande pour ce Meursault 2003 a explosé", souligne Koji Nakada.
"J'ai découvert que le vin, ce n'était pas que de l'alcool" - Jae-hwa Nakada
Il serait abusif, pourtant, de résumer le parcours des créateurs de Lou Dumont à l'écume médiatique provoquée par ce passage dans un manga à succès. Car depuis les premières bouteilles qu'il a appris à connaître dans la salle du restaurant tokyoïte où il exerçait, Koji Nakada a fait son chemin. C'est en 1996 qu'il débarque à Dijon avec l'intention de se former à la viticulture. C'est là aussi qu'il fait la rencontre de Jae-hwa, devenue son épouse et qui arrivait, elle, de Corée. "Au départ, mon but n'était pas d'étudier la viticulture, mais Koji m'a entraînée", explique-t-elle. "J'ai alors découvert que le vin, ce n'était pas que de l'alcool...".
C'est après avoir parfait sa formation au CFPA de Beaune et dans des domaines viticoles de la France entière que le couple décide de rester en Bourgogne. "Il y a un côté pur, unique, riche dans le vignoble bourguignon qui nous a incités à nous implanter ici", résument-ils.
Se faire une place dans le monde viticole bourguignon n'a pas été tous les jours facile pour eux, mais, aujourd'hui, leur grande satisfaction est de se dire : "Nous faisons partie du paysage".
"Nous fournissons l'ambassade de Corée à Paris et celle du Japon en Suisse" - Koji Nakada
Ils mêlent une activité d'élevage, en achetant leur raisin à différents producteurs, et une autre de courtage. "Depuis deux ans, nous faisons porter nos efforts sur le développement de la marque Lou Dumont", explique Koji Nakada. 80 % de ce qu'ils vendent part en Asie, en particulier sur les marchés nippons et coréens, mais aussi à Singapour, Hong-Kong ou Taïwan, avant, bientôt, peut-être, l'immense marché chinois. En octobre, ils s'envoleront d'ailleurs pour la Chine, afin de participer à un salon, avec la chambre de commerce.
Gevrey-chambertin, morey-saint-denis, ladoix-serrigny, corton, chambolle sont les appellations qui figurent chez Lou Dumont où le courtage représente pour l'heure 70 % de l'activité (l'élevage, 30 %). Des proportions appelées à évoluer dans un avenir proche. La société a récemment déménagé et une nouvelle cuverie est en cours de construction.
Si la production de Bourgogne par des ressortissants asiatiques peut surprendre, l'inverse est également vrai : en présentant leurs vins en Corée, Jae-hwa et Koji ont dû surmonter le préjugé qui veut que dans ce pays, aux yeux de la clientèle, un vin français ne peut être représenté que par un Français. Ces barrières mentales sautent pourtant une à une, parce qu'un jour, Koji Nakada est entré au Pépé le Moko à Tokyo..." - Berty Robert ; b.robert@lebienpublic.fr
Source : Le Bien Public