Après les Coréens de Chine et du Brésil, le comité Bourgogne de l'AAFC présente l'une des plus importantes minorités coréennes outre-mer : les Coréens Américains représentent une communauté de 1,8 million de personnes. Si les premiers arrivants ont débarqué à Hawaï il y a plus d'un siècle, la majorité des Coréens Américains vivent aux Etats-Unis depuis moins de deux générations.
Des vagues successives de migrations
L'histoire des Coréens aux Etats-Unis retrace plusieurs vagues de migrations :
- de 1903 à 1905, la première migration officielle autorisée par le gouvernement coréen, avant une mesure générale d'interdiction édictée par les Japonais, a conduit 7.000 Coréens à rejoindre les plantations de sucre à Hawaï, où ils ont subi une intense exploitation économique, levés à 4 heures du matin pour accomplir un travail des plus pénibles ;
- pendant la colonisation japonaise de la Corée (1910-1945), plus de 500 étudiants, actifs dans les mouvements d'indépendance, rejoignirent les Etats-Unis entre 1910 et 1918, alors que l'immigration légale, entre 1921 et 1940, de quelque 300 étudiants, munis d'un passeport japonais pour compléter leurs études aux Etats-Unis, a été entièrement distincte du mouvement en faveur de l'indépendance ; par ailleurs, de 1910 à 1924, les Coréens de Hawaï, majoritairement des hommes célibataires, furent rejoints par plus de 1.000 Coréennes à qui ils avaient envoyé leur photo, et qui avaient été attirées par la promesse d'une vie meilleure ;
- alors que seulement 10.000 Coréens vivaient aux Etats-Unis en 1945, les mouvements migratoires ont augmenté :
. d'une part, suite à la guerre de Corée, qui occasionna des mariages mixtes entre des Coréennes et des GI's américains ainsi qu'un vaste mouvement d'adoption d'orphelins coréens par des couples américains (les Etats-Unis comptent 110.000 adoptés d'origine coréenne, qui ne sont plus qu'en minorité des orphelins, sur 150.000 Coréens adoptés),
. d'autre part, du fait de quotas relativement importants d'immigration coréenne aux Etats-Unis (20.000 par an à partir de 1965, puis 30.000 par an à partir de 1976), ce qui a encouragé un important mouvement de "fuite des cerveaux" (brain drain), notamment d'étudiants coréens dont beaucoup ont choisi de rester aux Etats-Unis.
La vague de migration récente, dévenue numériquement prédominante, a concerné une population hautement qualifiée, ce qui n'a pas été sans poser de problèmes de déclassement social lorsque les emplois occupés ont été inférieurs aux qualifications scolaires et professionnelles.
Les Coréens américains et la lutte pour l'indépendance
Un des épisodes les plus connus de la lutte pour l'indépendance de la Corée aux Etats-Unis est l'assassinat, en 1908, de Durham White Stevens, conseiller diplomatique américain au Japon. Farouche partisan de la colonisation japonaise de la Corée, Stevens a été tué par Chang In-whan le 23 mars 1908 à San Francisco, ce qui a entraîné la formation du premier mouvement d"indépendance coréen aux Etats-Unis, le Kukminhoe, Association coréenne pour la libération de Chang In-whan.
Parmi les dirigeants du mouvement d'indépendance aux Etats-Unis figurent An Chang-ho, militant d'une émancipation par l'éducation, Park Yong-nam, à l'origine de la création d'unités de guérilla en Mandchourie, et Syngman Rhee, partisan d'une reconnaissance de la Corée par la voie diplomatique. A ce titre, Syngman Rhee est devenu président du gouvernement provisoire de la Corée établi à Shanghaï, puis premier président de la République de Corée du Sud, à l'issue d'élections séparées organisées dans la seule moitié méridionale de la péninsule.
Une organisation sociale communautaire très intégrée
Un tiers des Coréens Américains vivent aujourd'hui en Californie, les Etats américains les plus représentés étant ensuite New York (12 %), l'Illinois (5 %) et le New Jersey (5 %). Les villes de Los Angeles, New York et Chicago comptent des quartiers coréens ou Koreatowns (en bas et à droite, à Manhattan).
Les communautés coréennes aux Etats-Unis sont très organisées, autour de plus de 100 associations locales de résidents dont les présidents sont élus pour un mandat de deux ans (à l'origine notamment des manifestations comme la parade coréenne le Jour de la Corée, Korean Day), de chambres de commerce, d'associations athlétiques et surtout d'églises autour desquelles s'organisent la vie sociale. En 1992, outre 50 temples bouddhistes, on comptait 2.620 églises coréennes chrétiennes aux Etats-Unis, dont 650 appartenaient au mouvement baptiste, 680 aux différentes obédiences presbytériennes (250 églises pour les presbytériens américains et 230 pour les presbytériens coréens) et 300 à l'union méthodiste.
Si les activités économiques ont d'abord concerné le commerce de détail, non sans créer de graves incidents avec la communauté africaine américaine, certaines grandes entreprises américaines d'informatique sont également coréennes : Ten Tron Co, à Boston, de Johan Cho, Televideo Co., créée par Philip Hwang, et Diamond Co., à San Jose, de Chong-mun Lee.
La vie sociale est caractérisée par une émanicipation des femmes, dont une majorité travaillent et maîtrisent souvent mieux l'anglais que leur mari, par rapport au modèle coréen traditionnel à forte connotation patriarcale, ainsi que par une assimilation rapide des enfants, dont beaucoup ne parlent plus qu'anglais.
Principale référence bibliographique : Lee Kwang-kyu, Overseas Koreans, Jimoondang Publishing Company, Séoul, 2000, collection Korean Studies, n° 19. ISBN 89-88095-18-9.
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