Avec les Philippines, la Corée du Sud est aujourd'hui le pays le plus christianisé d'Asie orientale. Une situation originale qui s'explique notamment par le grand nombre de missionnaires français présents en Corée, dès le 19ème siècle. Si la majorité d'entre eux étaient originaires de Bretagne et de Vendée, plusieurs Bourguignons comptent aussi parmi les missionnaires français partis en Corée.
Plusieurs Bourguignons ont été formés aux Missions étrangères de Paris avant de partir évangéliser la Corée. Parmi eux, Eusèbe Bret, né à Dijon en 1858 et mort à Wonsan en 1908, a été en poste dans cette ville de 1895 à 1896, puis de 1897 à 1908, ses mauvaises relations avec la population locale ayant nécessité son remplacement en 1896-1897. Antoine Rigoulot, né à Germagny en Saône-et-Loire en 1873, est mort de la fièvre typhoïde à Wonju en 1900.
Le plus connu de ces missionnaires bourguignons est toutefois Just Ranfer de Bretenières, fils du baron de Bretenières, président de Cour d'appel, né à Chalon-sur-Saône en 1838. Il fait en effet partie du groupe de missionnaires dont la mort, en 1866, a servi de justification à la "lamentable expédition" du contre-amiral Roze, selon l'expression de Jean-Marie Thiébaud. En 1866, le contre-amiral Roze tenta en effet, sans succès, de faire de la Corée une colonie française.
Les prêtres chrétiens n'étaient alors pas autorisés en Corée : agissant de manière clandestine, ils s'exposaient à une condamnation à mort en cas de découverte. L'expédition de 1866 est largement le fruit de l'initiative personnelle du ministre de la France en Chine, Henri de Bellonet qui, contacté par un prêtre français en Corée, le père Ridel, après la mort de ses collègues, décida par lui-même d'envoyer une missive enflammée au roi de Corée :
"Le jour où le roi de Corée a porté la main sur nos malheureux compatriotes a été le dernier de son règne. Dans quelques jours, nos forces militaires vont marcher à la conquête de la Corée et l'empereur, mon auguste souverain, a seul aujourd'hui le droit et le pouvoir de disposer selon son bon plaisir du pays et du trône vacant (...) Puisque le royaume de Choson a tué neuf prêtres français, nous les vengerons en tuant 9.000 Coréens".
Fortes de 600 hommes, les troupes françaises quittèrent la Corée le 11 octobre 1866. Profitant du repli tactique des troupes coréennes, elles pillèrent les villes investies, comme Kangwha - en s'emparant notamment de manuscrits anciens, dont la demande de restitution reste une pomme de discorde dans les relations franco - sud-coréennes. Puis les batailles avec les troupes coréennes se soldèrent toutes par des échecs pour les Français, notamment le 26 octobre et le 7 novembre, dans les tentatives de prendre la forteresse de Munsusansong qui auraient ouvert la voie vers Séoul. Roze décida alors de lever l'ancre le 11 novembre, incendiant la ville de Kanghwa dans sa retraite sans gloire.
Quant au missionnaire Ranfer de Bretenières, ses restes furent exhumés, avant d'être transférés dans la crypte de la cathédrale de Séoul en 1900. Rapatriés en 1911, du fait de l'action conduite par le pape Pie X, ils se trouvent aujourd'hui dans le caveau familial, creusé sous la chapelle Saint-Simon, au nord de l'églide de Bretenières, en Côte d'Or. Just de Bretenières a été béatifié en 1968, puis canonisé à Séoul, le 6 mai 1984, par le pape Jean-Paul II.
Référence : Jean-Marie Thiébaud, "La présence française en Corée de la fin du XVIIIe siècle à nos jours", L'Harmattan, 2005.