Le cinéaste sud-coréen Park Chan-wook était l'invité du neuvième Festival du film policier de Beaune, qui a fermé ses portes le 2 avril 2017. A cette occasion, Park Chan-wook a donné plusieurs entretiens au quotidien régional Le Bien Public. Nous y revenons.
Le cinéma coréen contemporain aime mélanger les genres. De fait, Park Chan-wook assume ce cocktail de styles et d'influences, en usant de métaphores culinaires :
Lors d’un repas gastronomique, chaque plat est accompagné d’un vin pour être mis en valeur. J’utilise l’humour de la même manière : pour mettre en exergue la dimension tragique.
Park Chan-wook a en projet des films très différents de son registre habituel : du western... à la science-fiction.
J’ai beaucoup de rêves encore, comme celui de réaliser un grand western sur le mythe de la création de la nation américaine. La science-fiction, un bon film d’espionnage, les films musicaux à la Jacques Demy… La liste est trop longue.
L'écrivain Emile Zola, dont Thérèse Raquin a inspiré son film Thirst, ceci est mon sang, est une source d'inspiration pour le cinéaste, qui apprécie la richesse des portraits humains dressés par le romancier français :
On me pose souvent cette question car mon film Thirst est inspiré du livre Thérèse Raquin , mais j’en aime beaucoup d’autres. Zola excelle dans la description de l’aspect sombre de la nature humaine. C’est un observateur qui dissèque le cœur humain, mais sans jugement, sans haine, avec neutralité et beaucoup d’honnêteté dans la démarche. Je suis persuadé qu’il serait devenu un cinéaste s’il était né cinquante ans plus tard. Son univers est très cinématographique. S’il était né encore plus tard, il aurait même réalisé des séries télévisées, des vraies sagas. La Bête humaine est une œuvre parfaite pour une série au long cours.
De fait, le style du feuilleton pour la publication des romans français induit la comparaison pertinente avec le feuilleton télévisé contemporain (quand les Coréens, dans le domaine littéraire, ont développé pour leur part la forme du roman fleuve).
Revenant sur l'histoire tragique des Coréens, il dit avoir été inspiré par les luttes étudiantes - auxquelles n'ont par ailleurs pris part qu'une avant-garde engagée, pour justifier la place qu'occupe la violence non seulement dans ses films, mais plus généralement dans le cinéma coréen :
La violence vient d’une expérience personnelle de la terreur, que j’ai connue lorsque j’étais étudiant en classe de Terminale. À l’époque, la Corée était une dictature militaire. Les affrontements entre les étudiants manifestants et l’armée étaient d’une violence terrible. Et cela se passait en plein jour, à la vue de tous. Les jeunes faisaient face, bras dessus bras dessous, mais ils étaient morts de trouille car ils s’opposaient à des policiers armés jusqu’aux dents. Je tiens à préciser que je n’étais pas en première ligne. Je fuyais quand cela devenait trop violent. Mais 99 % des étudiants manifestaient à l’époque.
Revenant également sur son attrait pour la France, il met en exergue le caractère universel de la Révolution française et les valeurs qu'elle a portées :
J’ai une grande admiration pour la France, car c’est le pays de la Révolution. Au cours de ce processus, les Français ont établi une sorte d’échelle de valeurs morales qui sont, encore aujourd’hui, d’actualité. C’est comme si le monde entier avait une dette envers la France.
Lire l'intégralité des propos donnés par Park Chan-wook au Bien Public :
Park Chan-wook, cinéaste vorace
Park Chan-wook est un fin gourmet. Questionné sur son utilisation de l'humour, très présent dans une œuvre par ailleurs violente et marquée par la souffrance, il file la métaphore culinaire :...
http://www.bienpublic.com/edition-cote-de-beaune/2017/04/02/park-chan-wook-cineaste-vorace
" S'il était né plus tard, Zola aurait réalisé des séries TV "
Vous avez plusieurs fois exprimé votre admiration pour l'écrivain Émile Zola. Pourquoi ? " On me pose souvent cette question car mon film Thirst est inspiré du livre Thérèse Raquin , mais j'e...